Fatwa n° 764

Catégorie : Fatwas relatives au Jeûne – La réfection du jeûne

Le jugement du rapport sexuel pratiqué volontairement
lors du rattrapage du jeûne de Ramadân

            Question :

            Celui qui a eu un rapport avec son épouse, alors qu'il rattrapait un jour de Ramadân, doit-il effectuer une expiation ? Celle-ci incombe-t-elle aux deux personnes ou à l'homme seul ? S'ils ont commis un péché, cela fait-il partie des grands péchés ? Nous souhaitons que la réponse soit accompagnée de preuves. Qu’Allâh vous récompense.

 

            Réponse :

            Celui qui annule le jeûne de rattrapage de Ramadân, le jeûne d’une expiation ou n’importe quel autre jeûne obligatoire – à l'exception du jeûne de Ramadân – par un rapport sexuel ou une autre cause, de façon volontaire et sans excuse religieusement valable, cette annulation d’un acte d'adoration obligatoire entraîne le péché et l’obligation de rattrapage.

            La preuve de l'obligation du rattrapage est évidente dans le hadith d’Oumm Hâni رضي الله عنها qui rapporte que le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم a bu et lui a tendu ce qu'il buvait pour qu'elle en boive. Elle lui dit : “Je jeûne mais je n'aurais pas aimé rejeter le reste de ce que tu as bu.” Il صلَّى الله عليه وسلَّم dit alors : «Si ton jeûne consistait à rattraper le jeûne de Ramadân, alors, rattrape un jour à sa place, et si c'est un jeûne volontaire, alors fais comme tu veux : rattrape-le ou ne le rattrape pas(1). Quant à la preuve que le fait d'annuler un jeûne obligatoire volontairement est un péché, c'est la parole d'Allah :

﴿وَلَا تُبْطِلُوا أَعْمَالَكُمْ [محمَّد: 33]

Et n'annulez pas vos œuvres﴿ [s. Mouhammad : v. 33]

            En effet, il n'existe aucune différence entre le fait de rattraper Ramadân et le fait de l'accomplir en son temps du point de vue de l'interdiction de l'annuler par ce qui rompt le jeûne, et rien ne vient spécifier le sens général du verset. Aussi, on ne peut avancer que le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم a toléré l'acte d’Oumm Hâni رضي الله عنها et ne lui a pas reproché d'avoir rompu son jeûne, malgré que c'était un rattrapage ; or, il était dans une situation d'explication et il est interdit de retarder l'explication au-delà du moment où elle est nécessaire. Pourtant, il s'est contenté de lui expliquer, d'une part, qu'il est obligatoire de rattraper le jeûne, en lui donnant l’ordre de façon stricte, et, d'autre part, qu'il est permis à celui qui jeûne pour rattraper de rompre ce jeûne, en approuvant son acte. Cela est l'avis d'Ach-Chawkânî(2). Cela est faux car le fait que le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم ordonne à Oumm Hâni رضي الله عنها de rattraper au cas où elle aurait rompu le jeûne n'implique pas la permission de cet acte. En effet, parmi les conditions de l'approbation qui est un argument et une preuve, on compte, d'une part, l'absence de preuve indiquant l'interdiction et, d'autre part, le fait que celui à qui le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم ne dit rien n'a pas lui-même reconnu son péché et sa faute. Or, Oumm Hâni رضي الله عنها a reconnu cela, puisqu'elle dit dans la version d'At-Tarmidhî : “J'ai commis un péché, alors implore le pardon d'Allah pour moi.” Il صلَّى الله عليه وسلَّم dit : “Pourquoi, donc ?” Elle dit : “Je jeûnais et j'ai rompu le jeûne.” Il صلَّى الله عليه وسلَّم dit : “Etait-ce un rattrapage que tu faisais ?” Elle رضي الله عنها dit : “Non.” Il صلَّى الله عليه وسلَّم dit : “Alors, il n'y a aucun mal ?(3) Cela est appuyé par ce que l'on peut déduire de sa parole : “Alors, il n'y a pas de mal.”, et dans la version d'Aboû Dâwoûd, il est dit : “Il n'y a aucun mal si c'est un jeûne volontaire.(4) Cela prouve, par déduction, qu'il y aurait eu un mal si le jeûne avait été un rattrapage.

            Aussi, corrompre ce jeûne n'atteint pas le stade de grand péché, car il n'existe pas de menace spécifique et claire à ce sujet, si ce n'est le hadith d'Aboû Oumâma Al Bâhili رضي الله عنه dans lequel le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم dit en racontant son rêve : « Puis, on m'a fait continuer ma route, quand je vis des gens accrochés par leurs tendons d'Achille, les côtés de leurs bouches étaient déchirés et le sang en coulait. Je dis : “Qui sont-ils ?’’ Il dit : “Ceux-là sont ceux qui rompent le jeûne avant le temps du rupture  »(5), et la menace que recèle ce hadith concerne celui qui rompt le jeûne avant le coucher du soleil.

            Tous deux peuvent expier cela par le repentir et les bonnes œuvres. Ils doivent rattraper ce jeûne, sans qu'ils n'aient l'obligation de s'abstenir et de faire l'expiation légiférée en cas de rapports sexuels, car tous deux sont spécifiques à Ramadân, comme le montre le hadith du bédouin qui avait pratiqué un rapport volontairement pendant le Ramadân, rapporté par Aboû Hourayra(6)رضي الله عنه . Il est évident que l'obligation du jeûne de Ramadân a un temps précis et limité, alors que le rattrapage est libre. Le jugement du rattrapage diffère, donc, de celui de l'accomplissement, et c'est pourquoi l'expiation, en tant que jugement religieux, nécessite une preuve qui affirme qu'elle est légiférée dans le cas du rattrapage ; or, cette preuve n'existe pas.

 

            Le savoir parfait appartient à Allâh سبحانه وتعالى, et notre dernière invocation est qu’Allâh, Seigneur des Mondes, soit Loué et que prière et salut soient sur notre Prophète, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection.

 

Alger, le 10 de Chawwâl 1428 H,
correspondant au 22 octobre 2007 G.

 


(1)    Rapporté par Ahmad (26910), d'après Oumm Hâni رضي الله عنها; jugé sahih (authentique) par Al-Albanî dans As-Silsila As-Sahiha  (2802).

(2)    As-Sayl Al-Djarrâr d'Al Chawkâni : 2/151.

(3)    Rapporté par At-Tirmidhî (731), Ibn Aboû Chayba dans Al-Mousannaf (9068), d'après Oumm Hâni رضي الله عنها ; Al-Albâni a dit dans Takhrij Al-Michkât (1/642) : “Sa chaîne est Djayyid [très bonne]”.

(4)    Rapporté par Aboû Dâwoûd (2456), d'après Oumm Hânî رضي الله عنها ; jugé sahih (authentique) par Al Albanî dans Sahih Abî Dâwoud (2456).

(5)    Rapporté par Ibn Khouzayma (1986) ; Ibn Hibbân (1568) ; Al-Hâkim dans Al Moustadrak (1568) et Al-Bayhaqi (8006) ; jugé sahih (authentique) par Al-Albanî dans As-Silsila As-Sahiha  (3951) et dans Sahîh At-Targhib (1/588, n° 1005) et Mouqbil Al-Wâdi‘î dans As-Sahih Al Mousnad (483).

(6)  Rapporté par : Al Boukhâri (6709) et Mouslim (1111), d'après Aboû Hourayra رضي الله عنه.

.: Il n’est permis de faire référence à une matière ou l’attribuer au Cheikh que si celle-ci a été publiée sur son site officiel :.

.: Les matières du site sont exclusivement d’ordre scientifique jurisprudentiel émanant de la charia, et n'ont point d'objectifs médiatiques.

Elles ne doivent en aucune façon être publiées à l’occasion des occurrences et des nouvelles calamités vécues par la nation :.

.: L’adminstration du site web interdit la traduction et l’exploitation des matières publiées sur le site à des fins commerciales,

et autorise leur utilisation pour des raisons de recherche ou de prêche tout en faisant référence au site :.

Tous droits réservés (1424 H/2004 G – 1444 H/2022 G)