L’anathématisation, La juste position
des Gens de la Sounna et du Groupe

La juste position d’Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a concernant les appellations et les jugements

Louange à Allah, Maître des Mondes, et paix et salut soient sur celui qu’Allah a envoyé en miséricorde pour le monde entier, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection. Ceci dit :

Allah عزَّ وجلَّ a honoré la nation de Mouhammad صلَّى الله عليه وسلَّم et l’a placée au juste milieu entre les nations. Il dit عزَّ وجلَّ:

﴿وَكَذَلِكَ جَعَلْنَاكُمْ أُمَّةً وَسَطًا لِتَكُونُوا شُهَدَاءَ عَلَى النَّاسِ وَيَكُونَ الرَّسُولُ عَلَيْكُمْ شَهِيدًا﴾ [البقرة: 143].

Ce qui signifie :

Et aussi Nous avons fait de vous une communauté de justes pour que vous soyez témoins aux gens, comme le messager sera témoin à vous﴿ [El-Baqara (La Vache) : 143].

Pareillement, l’un de Ses bienfaits est qu’Il ait placé Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a (les Gens de la Sounna et du Groupe) au juste milieu par rapport à toutes les factions de la nation en ce qui concerne toutes les questions qui sont l’objet de divergence. Ainsi, le juste milieu est l’une des caractéristiques de la voie d’Ahl As-Sounna en croyance.

Toutes les autres factions établissent des règles qui leur sont propres et auxquelles ils veulent que les textes religieux se plient. Ils acceptent ces textes tant qu’ils sont à leur faveur. Mais dès qu’ils les contrarient, ils les réfutent ! Le résultat est que leurs voies ne se démarquent pas des deux extrêmes : celui de la négligence et celui de l’exagération.

Pour cela, Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a sont les plus heureux, car ils sont les plus attachés à la vérité et à la bonne voie, puisqu’ils se soumettent pleinement aux textes du Coran et de la Sounna. Ils n’en rejettent aucun élément et ne s’y opposent point. Plutôt, ils se limitent aux textes sans les transgresser ni les délaisser et recourir aux règles et raisonnements dits logiques, se conformant ainsi au verset où Allah عزَّ وجلَّ dit :

﴿يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُوا لاَ تُقَدِّمُوا بَيْنَ يَدَيِ اللهِ وَرَسُولِهِ وَاتَّقُوا اللهَ إِنَّ اللهَ سَمِيعٌ عَلِيمٌ﴾ [الحجرات: 1].

Traduction du sens :

Ô vous qui avez cru ! Ne devancez pas Allah et Son messager. Et craignez Allah. Allah est Celui qui entend tout parfaitement et est Omniscient﴿ [El-Houdjourât (Les Appartements : 1].

Donc, Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a jouissent de la voie la plus droite ; celle du juste milieu qui se démarque des deux extrêmes empruntés par les différentes sectes, à savoir l’exagération et la négligence.

Ceci dit, parmi les formes reflétant le juste milieu qui marque Ahl As-Sounna, nous citons leur modération en ce qui concerne les jugements, les appellations juridiques, les promesses de récompense [pour les bienfaiteurs] et les menaces de châtiment [contre les malfaiteurs]. Ce juste milieu se situe entre trois sectes : les Kharidjites, les Mou`tazilites et les Mourdji'ites.

Les Kharidjites déclarent mécréants les musulmans commettant des péchés majeurs et les condamnent au feu éternel. Ils les dénuent de foi et prétendent qu’ils ne bénéficieront d’aucune intercession en leur faveur le Jour du Jugement Dernier. Les Mou`tazilites jugent ceux qui commettent des péchés majeurs comme étant dans une position intermédiaire entre les croyants et les mécréants. Pour eux, ils ne font partie ni des uns ni des autres, et seront voués au feu éternel, mais leur châtiment sera moindre à celui des mécréants. Les Mourdji'ites déclarent, quant à eux, que tout péché ne saurait altérer la foi, de la même façon qu’aucun acte de piété ne saurait profiter à la personne mécréante. Ceci signifie, pour les tenants de cette secte, que le fait de commettre des péchés majeurs n’a aucun effet sur la foi du croyant qui reste alors intègre. En conséquence, la foi du pécheur et celle des Prophètes et des pieux seront pareilles, ne connaissant ni augmentation ni diminution.

L’anathématisation, un jugement religieux et une prérogative propre à Allah عزَّ وجلَّ

L’anathématisation est considérée, par Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a, comme étant un jugement religieux puisant son essence et sa légitimité dans les sources de la Charia. En conséquence, elle ne peut être appliquée qu’en s’appuyant sur les bases de la Charia, fondée sur le Coran, la Sounna et la compréhension des Salafs (Pieux Prédécesseurs). Donc, l’anathématisation est un droit propre à Allah عزَّ وجلَّ dont aucune créature n’en peut disposer.

Il en découle qu’Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a ne portent pas de jugements arbitraires [sur autrui]. Ils n’anathématisent que celui qui est digne d’anathème, et ce, conformément à un texte du Coran ou de la Sounna. Ils ne jugent pas mécréant un musulman pour le simple fait qu’il ait commis un péché, comme le font les kharidjites. Ils ne dénuent pas le musulman pervers de sa foi et ne le condamnent pas au feu éternel comme le prétendent les Mou`tazilites.

Plutôt, la conviction d’Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a vis‑à‑vis de ceux qui commettent des péchés ou des péchés majeurs parmi les gens de cette nation est qu’ils sont croyants grâce à leur foi ; ceci d’une part, d’autre part, ils sont pervers ou moins croyants à cause des péchés majeurs qu’ils commettent. Ainsi, ils ne méritent pas d’une façon absolue le nom de « croyant », et ne le déméritent pas non plus d’une façon absolue(1).

Abou `Outhmâne Es-Sâboûni رحمه الله a déclaré : « Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a croient que même si le musulman commet plusieurs péchés, qu’ils soient mineurs ou majeurs, nous ne devons pas l’anathématiser, même s’il meurt avant de se repentir. Tant qu’il meurt en ayant le credo de l’Unicité d’Allah et qu’il voue entièrement son adoration à Allah. Il est, alors, remis à la volonté d’Allah عزَّ وجلَّ : si Allah veut, Il lui pardonne et le mène au paradis le Jour de la Résurrection, sain et récompensé, sans connaître le supplice de l’enfer et sans être puni pour les péchés qu’il a portés en fardeau jusqu’au Jour de la Résurrection. Aussi, si Allah veut, Il le punit en lui faisant subir le supplice de l’enfer une certaine période. Mais dans ce cas, ce supplice ne saurait être éternel, et il adviendra un jour où Allah le sortira de l’enfer et l’affranchira pour lui donner pour résidence les jardins des délices de la demeure éternelle »(2).

Également, Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a n’anathématisent pas leurs antagonistes pour le simple fait qu’ils se soient opposés à eux. Leur jugement concernant les soixante-douze sectes de l’Islam qui les opposent est celui des gens qui sont menacés de châtiment parmi ceux qui commettent des péchés, qu’ils soient majeurs ou mineurs ; ils sont traités comme musulmans en ce monde. Dans l’au-delà, ils seront soumis à la volonté d’Allah : s’Il veut, Il leur pardonnera par Sa clémence عزَّ وجلَّ; mais s’Il veut aussi, ils seront châtiés conformément à Sa suprême justice, puis, finalement, ils rejoindront le paradis.

Ibn Taymiya رحمه الله a dit en parlant des kharidjites : « Si ces gens-là dont l’égarement a été établi par les textes et à l’unanimité n’ont pas été anathématisés, bien qu’Allah عزَّ وجلَّ et son Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم aient ordonné de les combattre, que dire alors des autres factions qui n’ont pas discerné le bon grain de l’ivraie dans des sujets où même certains plus savants qu’eux ont connu la confusion ? Il n’est donc pas permis que ces factions se mettent à se juger mécréantes les unes les autres ou s’arrogent le droit de tuer et de prendre les biens de l’autre, quand bien même la faction agressée serait une secte ayant une innovation religieuse certaine ; que dire alors du cas où la faction assaillante serait dans un état d’innovation similaire ? Il se pourrait même qu’il soit pire. En effet, dans la majorité des cas, ces factions ignorent l’essence de leur divergence »(3).

Discutant des gens de passions et des innovations parmi les soixante-douze sectes, Ibn Taymiya les a considérés comme étant musulmans, et a considéré le châtiment qu’ils encourent comme étant similaire à celui qu’encourent ceux qui commettent des péchés majeurs. Ibn Taymiya est précédé dans son opinion par les imams illustres. Il dit : « S’ils ne sont pas réellement mécréants, ils ne sont pas hypocrites, mais croyants. Il est, donc, permis d’implorer Allah de leur pardonner et d’être clément envers eux. Et quand un croyant dit :

﴿رَبَّنَا اغْفِرْ لَنَا وَلِإِخْوَانِنَا الَّذِينَ سَبَقُونَا بِالإِيمَانِ﴾ [الحشر: 10].

Le sens du verset :

Seigneur, pardonne-nous, ainsi qu’à nos frères qui nous ont précédés sur le chemin de la foi﴿ [El-Hachr (L’Exode) : 10], il désigne toutes les générations passées de la nation qui ont embrassé cette foi, même au cas où certains d’entre eux se seraient trompés par une mauvaise interprétation, auraient émis des avis contraires à la Sounna, ou auraient transgressé à un moment donné à Allah عزَّ وجلَّ. Malgré tout, ceux-ci restent des frères l’ayant précédé sur le chemin de la foi. Le verset les comprend, bien qu’ils feraient partie des soixante-douze sectes, car toute secte a une multitude de membres qui ne sont pas mécréants, mais ils sont plutôt des musulmans pécheurs, méritant le châtiment pour leur transgression de la même façon que le mérite le commun des transgresseurs.

D’autre part, le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم les a comptés parmi sa nation et ne les a pas qualifiés de mécréants et il n’a pas dit non plus qu’ils seraient éternellement en enfer. Tout cela est un principe très important qu’il convient de respecter »(4).

La différenciation entre les jugements globaux et ceux portés sur des individus précis en ce qui concerne l’anathématisation

Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a différencient entre le fait de porter des jugements d’anathématisation globaux sur les gens et le fait de désigner une personne précise et l’anathématiser ; ainsi, un acte ou une parole peut être, en effet, une chose blasphématoire sans que, nécessairement, celui qui en est l’auteur soit un mécréant. Pour franchir le pas, il faudrait être sûr qu’il ait pris compte des textes de la révélation qui lui prouvent qu’il a agi gravement et qu’il ne les accepte pas. Il faut aussi éliminer toute éventuelle ambiguïté à laquelle il pourrait s’accrocher ; car toute secte peut avoir des paroles blasphématoires, mais Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a ne vouent pas systématiquement leurs membres pris individuellement à l’enfer, car il est probable que le châtiment qu’ils encourraient par leur attitude ne les touche pas finalement, en raison d’une condition nécessaire non réunie, ou d’un facteur empêchant l’application du jugement(5).

Ils ne jugent donc point mécréant quiconque sans preuve établie par la religion, mais seulement si les conditions suivantes sont réunies :

-   Les paroles blasphématoires prononcées par l’individu doivent être proférées volontairement, en plein état de conscience et en possession de la pleine volonté.

-   Que ses paroles impliquent la mécréance, que cela lui soit démontré et que et, malgré tout, il ne les renie pas.

-   Que la vérité lui soit éclaircie sans nulle équivoque.

Ajouté à ces conditions qui doivent être réunies, citons les éléments dont on doit s’assurer de l’absence, à savoir :

-   La personne ne doit pas être dans un état [au moment de son acte] où sa raison est absente, comme un quelconque état de démence ou d’autres cas similaires.

-   La personne ne doit pas être nouvellement convertie à l’Islam ou dans une situation où elle n’a accès qu’aux fatwas de gens innovateurs en religion qu’elle aurait suivies.

-   Qu’elle n’ait pas accès aux textes du Coran et de la Sounna, comme c’est le cas de ceux qui vivent dans des contrées isolées, ou que des hadiths dits Âhâd lui sont transmis, mais ne les a pas jugés authentiques ; ou il ne les a pas compris ; ou il lui sont transmis, les a jugés authentiques et les a compris, mais un empêchement est survenu et les a, par conséquent, mal interprétés …etc.(6).

La différenciation entre celui qui se trompe et celui qui s’obstine dans l’erreur

Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a différencient également entre celui qui fournit les efforts nécessaires pour atteindre la vérité concernant une question et se trompe, dans ce cas, il est excusé et son erreur est pardonnée ; et celui qui s’obstine dans l’erreur après avoir pris compte de la vérité. Ce dernier qui choisit de s’opposer sciemment aux textes du Coran et de la Sounna et, par là, de s’opposer au Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم, de s’en démarquer et de suivre une voie autre que celle des croyants ne peut qu’être attaché à la mécréance et marqué de son sceau !

Si la personne se trompe simplement parce qu’elle néglige de fournir tous les efforts nécessaires pour atteindre la vérité concernant une question, ou suit ses passions, elle mérite le qualificatif de pervers et de pécheur. Chaykh El-Islâm Ibn Taymiya رحمه الله a dit dans ce sens : « Les Compagnons du Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم ainsi que l’ensemble des savants musulmans sont unanimes sur le fait que ne mérite pas l’épithète de « mécréant » toute personne ayant proféré des paroles erronées même si elles contredisent clairement la Sounna ; anathématiser toute personne se trompant va à l’encontre du consensus [des savants] »(7).

Il a dit رحمه الله aussi en établissant ledit principe : « Quant à l’anathématisation : le juste avis concernant cette question est que tout musulman fournissant les efforts nécessaires pour atteindre la vérité, tout en ayant l’intention sincère de l’atteindre, ne devient pas mécréant s’il ne l’atteint pas et sa faute lui sera pardonnée. Mais si, par contre, il s’écarte volontairement de la Sounna à laquelle il s’oppose sciemment, s’éloignant ainsi de la voie des croyants, il est alors mécréant. Mais, s’il enfourche ses mauvaises passions et manque à la recherche de la vérité et agit par ignorance, il est en état de transgression. Il peut être pervers. Comme il reste possible qu’il ait des actions pieuses acceptées par Allah qui prédomine sur ses péchés »(8).

En analysant l’ensemble des principes d’Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a, il apparaît clairement que leur voie est au juste milieu et est modérée en ce point délicat, de même qu’elle l’est en tous les points relatifs à la croyance musulmane qui a été le champ de l’égarement de beaucoup de gens par leur mauvaise compréhension.

Parmi les mérites d’Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a grâce auxquels Allah عزَّ وجلَّ les a prémunis de l’égarement et leur a permis d’être au juste milieu, on compte le fait qu’ils n’anathématisent un musulman en commettant un péché quelconque, bien qu’ils disent qu’il a tort. Les liens de fraternité confessionnels restent donc préservés même en cas de transgression à Allah عزَّ وجلَّ.

Ils se sont distingués par le bon savoir, l’équité et la miséricorde. Ils connaissent la vérité qui ne peut être que conforme à la Sounna et distante des innovations religieuses. Ils sont justes envers ceux qui se démarquent de la Sounna, même s’ils leur portent injustice. Ils éprouvent de la clémence et de la compassion envers les créatures, leur veulent le bien et souhaitent qu’elles soient pieuses et bien guidées ; contrairement à ceux qui se laissent glisser facilement dans l’anathémisation des gens ; ceux-là sont caractérisés par leur ignorance et leur iniquité. Ils ont pris les non mécréants pour des mécréants.

À l’opposé, ceux se trouvant à l’autre extrême, celui de la négligence. Ils n’ont pas jugé les actes et les paroles de mécréance comme tels ; leur ignorance de la réalité de la foi en est la cause.

Par ailleurs, parmi les raisons du basculement vers la négligence et l’exagération le fait de ne pas recourir au Coran et à la Sounna, de mélanger le vrai et le faux, de ne pas distinguer entre ce qui est Sounna et innovation, de laisser libre gré à ses passions et la mauvaise interprétation des textes.

Face à tous ceux-là, les véritables croyants furent guidés par Allah عزَّ وجلَّ vers la voie de la vérité que beaucoup n’ont pas empruntée par Sa suprême volonté. Certes, Il guide celui qui Il veut vers le droit chemin, celui de la vérité.

La mise en garde contre l’anathématisation d’un musulman donné

Les textes coraniques et ceux de la Sounna sont clairs sur ce sujet : l’honneur et la foi des musulmans sont protégés. Ils mettent en garde de façon insistante contre l’anathématisation injuste d’un quelconque musulman. Allah عزَّ وجلَّ dit :

﴿يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُوا إِذَا ضَرَبْتُمْ فِي سَبِيلِ اللهِ فَتَبَيَّنُوا وَلاَ تَقُولُوا لِمَنْ أَلْقَى إِلَيْكُمُ السَّلاَمَ لَسْتَ مُؤْمِنًا تَبْتَغُونَ عَرَضَ الْحَيَاةِ الدُّنْيَا فَعِنْدَ اللهِ مَغَانِمُ كَثِيرَةٌ كَذَلِكَ كُنْتُمْ مِنْ قَبْلُ فَمَنَّ اللهُ عَلَيْكُمْ فَتَبَيَّنُوا إِنَّ اللهَ كَانَ بِمَا تَعْمَلُونَ خَبِيرًا﴾ [النساء: 94].

Le sens du verset :

Ô les croyants ! Lorsque vous sortez pour lutter dans le sentier d’Allah, voyez bien clair (ne vous hâtez pas) et ne dites pas à qui vous adresse le salut (de l’Islam) : « Tu n’es pas croyant », convoitant les biens de la vie d’ici-bas. Or, c’est auprès d’Allah qu’il y a beaucoup de butin. C’est ainsi que vous étiez auparavant ; puis Allah vous a accordé Sa Grâce. Voyez donc bien clair. Allah est, certes, parfaitement Connaisseur de ce que vous faites﴿ [En-Nissâ` (Les Femmes) : 94].

Il dit aussi :

﴿وَالَّذِينَ يُؤْذُونَ الْمُؤْمِنِينَ وَالْمُؤْمِنَاتِ بِغَيْرِ مَا اكْتَسَبُوا فَقَدِ احْتَمَلُوا بُهْتَانًا وَإِثْمًا مُبِينًا﴾ [الأحزاب: 58].

Le sens du verset :

Et ceux qui offensent les croyants et les croyantes sans qu’ils l’aient mérité se chargent d’une calomnie et d’un péché évident﴿ [El-Ahzâb (Les Coalisés : 58].

Le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم déclare dans ce sens : « Si une personne accuse une autre de perversion ou de mécréance sans que celle-ci le soit réellement, l’accusation retombe alors sur la personne accusatrice »(9). Il dit aussi : « Le fait de maudire un musulman équivaut à son meurtre, ainsi que le fait de l’accuser de mécréance »(10).

Et si l’anathématisation d’un musulman donné en guise d’insulte équivaut à son meurtre, que dire du cas où ceci est perpétré par conviction religieuse ?

Ibn Taymiya a dit : « Cela est, sans doute, plus grave (que son meurtre), car, il est permis de tuer tout mécréant, alors que toute personne méritant la mort n’est pas forcément mécréante »(11).

D’autre part, anathématiser injustement un musulman revient à attaquer la foi elle-même. Et si entretenir de mauvaises intentions envers un musulman est illicite, que dire de son excommunication ?

La gravité de l’anathématisation du musulman

Il est donc impératif pour le musulman de ne point aborder ce sujet sensible et sérieux sans être doté d’un important bagage de savoir religieux. Ech-Chawkâni رحمه الله a dit : « Sachez qu’il ne convient à aucun musulman d’anathématiser un musulman sans avoir de preuves encore plus claires que la lumière du jour elle-même. En effet, des hadiths authentiques rapportés par nombre de Compagnons déclarent : « Lorsqu’un musulman dit à son frère : Ô mécréant, l’un d’eux mérite alors assurément cette apostrophe »(12) »(13).

Il n’est pas permis également d’anathématiser un musulman au gré des passions ou parce que « la raison le dicte », et ce n’est pas parce qu’il va à l’encontre de règles rationnelles établies que le musulman devient apostat, car étant donné que ce jugement est religieux, il est impératif de ne l’émettre qu’en se référant aux textes religieux. Ibn Taymiya رحمه الله a dit : « Le fait de juger quiconque mécréant est un jugement religieux et il n’est pas juste de juger quiconque mécréant sous prétexte qu’il a contrarié ou renié ce qui semble déraisonnable de contrarier. Et même dans ce cas, on ne peut le juger apostat que dans le cas où sa parole est jugée comme étant une apostasie par la Charia »(14).

Les retombées de l’anathématisation sont graves et lourdes de conséquences. Celle-ci entraîne des calamités et des afflictions ; la personne sur laquelle elle s’abat voit le respect de ses biens et de son corps disparaître, ses éventuels liens conjugaux rompus, les droits d’héritage des biens de ses proches, ainsi que ceux de ses proches à hériter ses biens annulés ; il n’est plus permis, aussi, de pratiquer la prière funéraire en sa faveur s’il meurt et, enfin, il ne pourra pas être enterré dans un cimetière des musulmans. Allah عزَّ وجلَّ dit :

﴿وَلاَ تَقْفُ مَا لَيْسَ لَكَ بِهِ عِلْمٌ إِنَّ السَّمْعَ وَالْبَصَرَ وَالْفُؤَادَ كُلُّ أُولَئِكَ كَانَ عَنْهُ مَسْئُولاً﴾ [الإسراء: 36].

Ce qui signifie :

Et ne poursuis pas ce dont tu n’as aucune connaissance. L’ouïe, la vue et le cœur : sur tout cela, en vérité, on sera interrogé﴿ [El-Isrâ' (Le Voyage Nocturne) : 36].

Nous devons nous éloigner du mal, nous rapprocher du bien et œuvrer pour qu’il se réalise. Nous devons également suivre la voie de la foi et nous y agripper, car c’est en elle que réside la victoire au Jour Dernier, et non pas en suivant les chemins des passions. Ce n’est pas par des opinions hérétiques ni par des visions prétendues, ou encore par de vagues souhaits que l’on accède au bonheur éternel ; mais par l’adhésion à la claire révélation faite par Allah عزَّ وجلَّ, qui est, en effet, un véritable guide et un droit chemin. Allah عزَّ وجلَّ dit :

﴿وَكَذَلِكَ أَوْحَيْنَا إِلَيْكَ رُوحًا مِنْ أَمْرِنَا مَا كُنْتَ تَدْرِي مَا الْكِتَابُ وَلاَ الإِيمَانُ وَلَكِنْ جَعَلْنَاهُ نُورًا نَهْدِي بِهِ مَنْ نَشَاءُ مِنْ عِبَادِنَا وَإِنَّكَ لَتَهْدِي إِلَى صِرَاطٍ مُسْتَقِيمٍ. صِرَاطِ اللهِ الَّذِي لَهُ مَا فِي السَّمَاوَاتِ وَمَا فِي الأَرْضِ أَلاَ إِلَى اللهِ تَصِيرُ الأُمُورُ﴾ [الشورى: 52-53].

Le sens du verset :

Et c’est ainsi que Nous t’avons révélé un esprit [le Coran] provenant de Notre ordre. Tu n’avais aucune connaissance du Livre ni de la foi ; mais Nous en avons fait une lumière par laquelle Nous guidons qui Nous voulons parmi Nos serviteurs. Et en vérité tu guides vers un chemin droit, le chemin d’Allah à Qui appartient ce qui est dans les cieux et ce qui est sur la terre. Oui c’est à Allah que s’acheminent toutes les choses﴿ [Ech-Choûra (La Consultation) : 52 et 53].

Notre dernière invocation est qu’Allah, Seigneur des Mondes, soit loué et que prière et salut soient sur notre Prophète, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection.

 



(1) Voir : Madjmoû` El-Fatâwa d’Ibn Taymiya (3/151-152) et Charh El-`Aqîda Et-Tahâwiyya d’Ibn Abi El-`Iz (316, 369).

(2) Voir : `Aqîdat Es-Salaf As’hâb El-Hadîth d’Es-Sâboûni (71-72).

(3) Voir : Madjmoû` El-Fatâwa d’Ibn Taymiya (3/282-283). Voir aussi l’établissement de la voie d’Ahl As-Sounna Wal Djamâ`a concernant cette question dans la référence précédente (3/348 et ce qui vient après) (7/217-218).

(4) Voir : Minhâdj As-Sounna d’Ibn Taymiya (5/240-241).

Je dis : les membres des soixante-douze sectes qui ont des erreurs par rapport à la croyance originelle appartiennent à la communauté musulmane ; mais à condition que leurs convictions réelles ne dissimulent pas le rejet de la Sounna du Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم, ou la négation du Créateur, ou le refus de se référer aux prescriptions de la religion révélée au Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم ou, enfin, la non-reconnaissance des obligations religieuses. Et s’il s’avérait, par l’étude de l’origine de l’apparition d’une secte, qu’elle dissimule en fait la mécréance et l’annulation de la Charia ou autre, et que ceci est apparent dans les paroles de leurs maîtres à penser, ou sous-entendu dans leurs déclarations, ces sectes ne pourraient en aucun cas faire partie de la nation musulmane, mais y seraient étrangères.

C’est par ces critères que le jugement des sectes et factions peut être établi et délimité.

(5) Voir : Madjmoû` El-Fatâwa d’Ibn Taymiya (10/370-372) (35/165-166).

(6) Voir : les critères de l’excuse due à l’ignorance dans un autre ouvrage de l’auteur intitulé Tawdjîh El-Istidlâl Bin-Noussoûs Ech-Char`iyya `Ala El-`Oudhr Bil-Djahl Fil-Massâ'il El-`Aqadiyya, édition numéro 12, de Silsilat Tawdjîhât Salafiyya.

(7) Voir : Madjmoû` El-Fatâwa d’Ibn Taymiya (7/685).

(8) Voir : Madjmoû` El-Fatâwa d’Ibn Taymiya (12/180).

(9) Rapporté par El-Boukhâri, chapitre de « La bienséance » (10/464), concernant l’interdiction des insultes et de la malédiction, par l’intermédiaire d’Abou Dhar El-Ghifâri رضي الله عنه.

(10) Rapporté par El-Boukhâri, chapitre de « La bienséance » (10/465), concernant l’interdiction des insultes et de la malédiction, par l’intermédiaire Thâbit Ibn Edh-Dhahhâk رضي الله عنه.

(11) Voir : El-Istiqâma d’Ibn Taymiya (1/165-166).

(12) Rapporté par Mouslim, chapitre de « La foi » (2/49), du fait de dire au musulman : « Ô mécréant », par l’intermédiaire d’Ibn `Omar رضي الله عنهما.

(13) Voir : Es-Sayl El-Djarrâr d’Ech-Chawkâni (4/478).

(14) Voir : Madjmoû` El-Fatâwa d’Ibn Taymiya (12/525).

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